Hypnothérapie
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Paris

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Déliances de l’enfance, reliances de l’adulte.


L’hypnose, un agent de reliance
Par Armelle TOUYAROT et Félix BENCHIMOL



Dès la naissance, le bébé, puis l’enfant, et l’adulte ont à se délier et se relier.

La reliance, un concept issu de la sociologie

La modernité, fondée sur la raison, s’est construite sur le principe de séparation, voire de division : diviser pour comprendre (Descartes), diviser pour produire (Taylor), diviser pour régner (Machiavel), diviser et découper le savoir en unités minimales dans des programmes pour mieux apprendre. Ceci aboutit à un morcellement, des compartimentations, qui engendrent une perte de sens. Marcel Bolle de Bal analyse l’émergence de la reliance comme une suite logique et nécessaire à la déliance et un retour à une « liance » constitutive de l’humain.

À l’issue d’une concertation pluridisciplinaire, présentée dans un article de la revue Connexions en 1981, Marcel Bolle de Bal définit la reliance avec une double signification conceptuelle :

- l’acte de relier ou de se relier : la reliance agie, réalisée, c’est-à-dire l’acte de reliance ;

- le résultat de cet acte : la reliance vécue, c’est-à-dire l’état de reliance.

Relier s’entend comme : « créer ou recréer des liens, établir ou rétablir une liaison entre une personne et soit un système dont elle fait partie, soit l’un de ses sous-systèmes ».

Bolle De Bal précise ses raisons de recourir à l’emploi du terme de « reliance », et donc du verbe « relier » en lieu et place du verbe lier, pour décrire les liens entre personnes et groupes de personnes. De tels liens existant ou ayant existé, les acteurs sociaux, étant ou ayant été ainsi « liés » peuvent être RE-liés :

- soit par l’établissement de liens complémentaires,

- soit par le rétablissement de liens disjoints,

- soit, évidemment, par les deux à la fois.

La reliance, un concept multi-référentiel

Reliance, mot signifiant et expressif qui évoque en même temps la matière, le lien, la ligature, le liant, et l’immatériel, l’affect, la mémoire, la communication, le transfert… Reliance, c’est aussi un climat, une ambiance, un état d’esprit qui rapprochent les individus dans une population, ce qui peut être vécu en commun par un groupe, ou ce qui permet de vivre ensemble et avec soi. La reliance renvoie à une notion de « partage des solitudes acceptées et des différences respectées ». Cette solitude nous ramène à l’individu, son identité qui est le pendant de la reliance. L’individu se reconnaît comme être unique, séparé qui cherche à se relier aux autres, ou ce que Kant appelle « l’insociable sociabilité de l’homme ». La reliance est liée à ce besoin d’être avec les autres, « cette chose archaïque qu’est le besoin de reliance » dont parle Michel Maffesoli.

La reliance s’inscrit dans une vision systémique et complexe du monde, elle envisage les rapports entre les individus, leurs imaginaires, leurs expériences, leurs univers de croyance. C’est une approche multi-référentielle, c’est-à-dire faisant intervenir divers regards sans pour autant les confondre, regards qui gardent leurs spécificités.

On distingue plusieurs niveaux de reliance : la reliance à soi (reliance psychologique), la reliance aux autres (reliance sociale), la reliance au monde (reliance culturelle, écologique ou cosmique), la reliance à l’espèce humaine (reliance ontologique), la reliance des idées (reliance scientifique, intellectuelle, voire spirituelle), la reliance entre les choses (reliance physique dans le monde des molécules). Bolle de Bal et al. ont souligné la spécificité du sens englobant de ce « concept charnière » et sa transversalité dans les sciences humaines (économie, psychologie, psychanalyse, sociologie, anthropologie, sciences de l’éducation, travail social, ergonomie). La reliance est une notion médiatrice, échappant à un seul champ disciplinaire en se situant à la jonction du mental et du social, de l’individuel et du collectif.

Reliance / déliance psychologique

Selon Bolle de Bal, la reliance psychologique est décrite comme « la reliance entre une personne et les diverses instances de sa personnalité ». Alain Eraly démontre que la reliance à soi est tout autant « médiatisée » que la reliance à autrui, que cette médiation est langagière, qu’elle suppose la réflexivité, c’est-à-dire la réflexion qui prend « soi » pour objet spécifique. Distinguant, à la suite des sociologues interactionnistes, le je (l’acteur) et le soi (l’objet social), il examine divers processus pour ne retenir que deux véritables formes de réflexivité : le fait de parler à soi et de parler de soi. N’est-ce pas là fondamentalement le sens profond du travail de tous les psychothérapeutes : aider les patients en état de déliance psychologique et sociale à « parler à soi » et « de soi » ?

Le concept de reliance prend en compte la dimension de conscience de soi, de complémentarité sociale et de conscience du monde. Le besoin de reliance a à voir avec le besoin de reconnaissance, d’estime de soi. Les concepts (notions) de reliance et de déliance ne font jusqu’à présent pas partie des outils épistémologiques auxquels ont recours les psychologues, les psychiatres et les psychothérapeutes. Pourtant, ils nourrissent des liens qui semblent être évidents avec les concepts d’attachement, de séparation et d’individuation dont nul n’ignore le caractère central pour la formation de l’identité, de la personnalité.

Déliances de l’enfance

Tout acte de création est un acte de séparation, de déliance : nommer, c’est séparer, reconnaître comme singulier, comme individu. Relier, au contraire, c’est tenter de regrouper, de rencontrer, « régresser » vers l’unité primordiale, anonyme. C’est une reliance intime entre un homme et une femme qui est à l’origine d’un être nouveau. Une fois cet être accompli dans le ventre maternel, c’est par un acte de déliance qu’il naît à la vie.

À partir de la naissance, la vie sera jalonnée d’une suite d’expériences de déliance et de quêtes de reliance. L’enfant (l’adulte ensuite) ne peut devenir un être autonome, responsable, « relié » aux autres, sans passer par des moments de séparation, de perte, de « déliance ». La personnalité est le fruit d’une histoire double, emboîtée : une histoire familiale et une histoire personnelle. On peut concevoir que l’une et l’autre se tissent au fil de dé-liances et re-liances successives.

Cependant il arrive que certaines déliances persistent et continuent de se manifester sous forme de symptôme. La psychothérapie offre alors une aire transitionnelle de reliance dans laquelle le patient et le thérapeute expérimentent une reliance sociale, ce que d’aucuns appellent « l’alliance thérapeutique » et que nous pourrions qualifier de « reliance thérapeutique » (reliance avec le thérapeute et reliance par la thérapie), source de reliance psychologique.

La reliance en thérapie

Le point de vue reliance

L’individu est vu comme un ensemble de déliances et de reliances, comme un système construit autour de ce mécanisme de base. « La dualisation de la déliance/reliance permet ainsi de relire certains problèmes […] en contraignant à rompre avec le cadre référent alarmiste sans tomber dans un volontarisme édénique ; elle autorise alors leur appréhension en jouant sur un double mouvement simultané de déconstruction/reconstruction. » (Marc-Henry Soulet)

Le rôle du thérapeute

Le thérapeute va médiatiser les liens que le patient entretient avec lui-même, les autres et le monde. Autrement dit, permettre au patient d’avoir une vision du champ relationnel dans lequel s’inscrit le symptôme et de faire appel à son potentiel d’adaptation, de reliance, pour transformer ce champ relationnel vers sa réalité souhaitée ; donc, objectiver son champ relationnel.

Pour cela, le thérapeute va considérer :

- le symptôme (douleur, souffrance, blocage…) comme une déliance. Le patient l’exprime dès la première minute.

- le patient (dans sa globalité) en tant qu’individu en vie : la physiologie, les processus de la pensée, et la respiration sont liées. (Par exemple, il est difficile d’exprimer sa colère en chuchotant et en parlant très lentement.)

- textuellement et au premier degré ce que donne le patient comme image ou représentation de son vécu actuel, son état de reliance.

Les implications de ce point de vue dans notre pratique

À ce jour, nous n’en mesurons pas encore l’étendue… L’onde de choc continue de se propager… Nous pouvons déjà dire que ce concept de reliance nous a servi :

- à nommer une activité, non consciente la plupart du temps, et à prendre conscience de cette activité continue ;

- à reconnaître notre état comme l’état de reliance et à l’évaluer ;

- à prendre conscience des liens qui nous constituent et que nous constituons, des modes de lien qui nous animent, de nos limites ;

- à réévaluer notre modèle ou champ relationnel (relations à soi, relations aux autres, relations au monde…). Ce qui a ouvert à des perspectives inédites, de nouvelles reliances à soi, au travail, aux autres et au monde environnant.

L’hypnose, un agent de reliance

Il y a longtemps que nous pratiquions des actions de reliance dans notre activité thérapeutique, d’accompagnement, de conseil, de formation, sans leur donner ce nom ! En prendre conscience a provoqué un changement radical de point de vue. Car l’hypnose s’avérait alors un agent de reliance per se, du fait même de ses caractéristiques :

- L’orientation intérieure permet d’observer la reliance à soi-même.

- L’attention modifiée (à la fois élargie au réseau relationnel et focalisée sur un lien particulier) permet d’appréhender la réalité de manière différente et d’agir sur les relations qui participent à la construction de la réalité.

- La réceptivité accrue favorise la suggestion des nouvelles possibilités et permet d’établir de nouveaux liens (dissociation-association-réassociation). L’approche éricksonienne participe de la reliance. Pour Milton Erickson, qui trouvait nécessaire une alliance du conscient et de l’inconscient, l’hypnose, en mobilisant tous les registres (donc les ressources) de l’individu, permet d’apporter, par de nouvelles associations, de nouvelles significations à la conscience.



ARMELLE TOUYAROT
Sage-femme libérale, psychothérapeute, hypnothérapeute (IFATC, Master thérapies éricksoniennes, Mexico). Enseignante D.U. Hypnose (Toulouse, Limoges), formatrice ACTIIF, CEFATC, LIEN, ATNH, etc. Auteur de Pas à pas – Guide d’autopréparation à l’accouchement par l’hypnose

FÉLIX BENCHIMOL
Philosophe, expert en traitement de l’information. Psychothérapeute hypnothérapeute (CEFATC). Formateur. Consultant.

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1ère partie : hypnose pour l’enfant douloureux 
Introduction ; recherches scientifiques clefs, avantages généraux de l’hypnose chez l’enfant douloureux (Chantal Wood) 
Avantages de l’autohypnose et comment la proposer et suivre l’enfant (Isabelle Ignace) 
Illustrations dans l’urgence et dans la durée (Thierry Moreaux) 
Ce que l’hypnose modifie dans la relation entre soignant et soigné douloureux (Chantal Wood) 

2ème partie: l'enfant et le monde 
Déliances de l’enfance, reliances de l’adulte (Armelle Touyarot et Félix Benchimol) 
Histoire de mère, histoire de bébé (Isabelle Stimec) 
Double hommage à D. Stern (Luc Farcy. Stefano Colombo) 
Un père raconte (Jean-Michel Hérin) 
Le monstre dans la littérature fantastique (Didier Lafargue) 
TOC chez l'enfant (Jean-François Marquet) 
Hypnose solutionniste en pédiatrie ambulatoire (Hervé Fischer et Dominique Farges-Queraux) 
De la pratique thérapeutique à l’art de vivre (Isabelle Celestin Lhopiteau) 

3ème partie: l'enfant : un être de projet 
L'importance de la relation en hypnothérapie avec l'enfant (Antoine Bioy, Chantal Wood)) 
Mon Alter Héros (Maxime Lamourette) 

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Rédigé le 05/08/2018 à 22:20 | Lu 539 fois | 0 commentaire(s) modifié le 22/02/2020





Sophie Tournouër, Psychologue clinicienne, Hypnothérapeute et Thérapeute Familiale. praticienne... En savoir plus sur cet auteur

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